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Médicament contre l’acné sévère : Quels sont les risques pour les patients ?

Le Roaccutane : un nom bien connu des personnes souffrant d’acné sévère. Si ce médicament n’est aujourd’hui plus commercialisé, il a été remplacé par de nombreux génériques. Contracné, Curacné, Procuta, Isotrétinoïne Acnétrait, prescrits pour une durée de six à huit mois lorsque les autres traitements n’ont pas suffi, ces produits présentent des risques non négligeables, connus depuis déjà plusieurs années. L’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) a publié ce jeudi une note visant à « mieux faire connaître les risques associés à l’isotrétinoïne orale ».

« Ces traitements sont extrêmement efficaces, mais fonctionnent au prix d’importants effets indésirables qu’il faut connaître et maîtriser », souligne Nathalie Dumarcet, cheffe de pôle des médicaments en dermatologie à l’ANSM. A noter que 122.580 personnes ont pris de l’isotrétinoïne en 2019. Un chiffre relativement stable depuis une dizaine d’années.

Des cas de dépression, voire d’idées suicidaires

Il existe tout d’abord un risque psychiatrique, notamment de troubles de l’humeur. Une enquête nationale de pharmacovigilance a été réalisée en 2021 sur les spécialités à base d’isotrétinoïne pour comprendre leurs liens avec les troubles psychiques. Les professionnels ont notamment analysé les 449 cas de troubles psychiatriques remontés dans des centres régionaux de Pharmacovigilance sur trente ans. Parmi eux, 43 % présentent un trouble dépressif, 10,7 % ont fait une tentative de suicide et 6 % ont mis fin à leurs jours. Alors que seulement 9,8 % présentaient des antécédents psychiatriques.

Toutefois, le lien entre prise d’antiacnéiques et troubles psychiatriques n’est pas établi scientifiquement. « A ce jour, il n’y a pas de corrélation, car ces troubles sont déjà observés chez cette population jeune [principale consommatrice d’isotrétinoïne]. Il y a trop de facteurs confondants », justifie la cheffe de pôle des médicaments en dermatologie. Le fait de vivre avec une acné sévère peut également aggraver la santé mentale.

30 % de risque de malformation du fœtus

Contrairement à ce que l’on pourrait croire, l’acné ne touche pas que les adolescents. Les femmes en âge d’être enceintes peuvent être sous traitement. Et sont sujettes à des risques, notamment pour le fœtus. Environ trois bébés sur dix dont la mère est traitée avec de l’isotrétinoïne pendant la grossesse présenteront une malformation grave à la naissance, « même après une seule prise » ajoute l’experte. Si le risque d’avoir un bébé avec une anomalie congénitale est de 2 à 3 % pour une femme ne prenant pas de traitement, ce risque atteint 30 % en cas de prise d’isotrétinoïne par voie orale. « C’est énorme », insiste Nathalie Dumarcet.

Parmi les malformations repérées chez le fœtus : l’anomalie du système nerveux central, la malformation du cerveau, du visage (œil trop petit, bec-de-lièvre) ou encore des troubles cardiaques. Et ce n’est pas tout. La prise d’isotrétinoïne pendant la grossesse ou dans les mois qui la précèdent, entraîne également une hausse du risque de fausses couches, de bébé mort-né ou de décès peu de temps après la naissance.

Des solutions pour réduire ces risques

Face à ces risques, que faire ? « Il est obligatoire d’avoir une contraception avant de prendre ce traitement », rappelle Nathalie Dumarcet, qui va même plus loin : « On invite à utiliser une pilule plus un préservatif ou un stérilet seul. » Mettre la ceinture et les bretelles, donc, pour être sûr de réduire au maximum le risque de grossesse. La médecin incite également à faire un test de grossesse avant la première prise, puis tous les mois afin d’arrêter immédiatement le traitement en cours si la personne se rend compte qu’elle est enceinte. « Il faudra ensuite se poser la question de ce que l’on fait après mais ça, c’est un choix personnel. »

Concernant les troubles psychiatriques, Nathalie Dumarcet conseille à la personne prenant l’antiacnéique et à ses proches de surveiller tout changement d’humeur. « Si jamais un trouble psy se manifeste, se posera ensuite la question de poursuivre ou non le traitement mais on est moins catégorique que dans le cas de la grossesse. La décision se prendra en concertation entre le patient et son médecin. » Une balance bénéfices-risques. « Ce n’est pas la peine de prendre ces risques parce qu’on a deux petits boutons, résume la médecin. Ce traitement doit être pris seulement si l’acné est tellement sévère que ça vous pourrit la vie. »

Malgré de nombreuses mesures d’alerte, environ 175 personnes tombent enceintes sous isotrétinoïne chaque année. A partir de septembre, toutes les boîtes de ce médicament auront un QR code redirigeant vers des vidéos rappelant les risques du traitement.

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