Si l’aide humanitaire destinée à la ville de Derna afflue ce samedi 16 septembre, les espoirs de retrouver des survivants s’amenuisent six jours après les inondations catastrophiques qui ont fait des milliers de morts et de disparus dans l’Est de la Libye. Des organisations humanitaires ont mis en garde contre le risque croissant de propagation de maladies, liées à une éventuelle contamination de l’eau.
La tempête Daniel a frappé dans la nuit de dimanche à lundi Derna, une ville de 100.000 habitants. Elle a entraîné la rupture de deux barrages en amont, ce qui a provoqué une crue fulgurante, de l’ampleur d’un tsunami, le long de l’oued qui traverse la cité, emportant tout sur son passage.
Une situation « chaotique »
Manoelle Carton, coordinatrice médicale d’une équipe de Médecins sans frontières (MSF) arrivée il y a deux jours à Derna, décrit une situation « chaotique » qui a empêché le bon déroulement du recensement et l’identification des victimes. « De nombreux volontaires de toute la Libye et de l’étranger sont sur place. La coordination de l’aide est urgente », insiste-t-elle. Samedi, à l’aéroport Benina de Benghazi, un avion émirati et un autre iranien ont déchargé des tonnes d’aides dans des camions, pour être acheminés ensuite vers la zone sinistrée, à 300 km.
Le travail des secours et des équipes de recherche est considérablement entravé par le chaos politique qui prévaut dans le pays d’Afrique du Nord depuis la mort du dictateur Mouammar Kadhafi en 2011, avec deux gouvernements rivaux, l’un à Tripoli (ouest), reconnu par l’ONU et dirigé par le Premier ministre Abdelhamid Dbeibah, et l’autre dans l’Est, affilié au camp du puissant maréchal Khalifa Haftar.
L’OMS a pour sa part annoncé l’arrivée à Benghazi de « 29 tonnes de matériel médical » depuis son hub logistique mondial à Dubaï, « suffisamment pour aider près de 250.000 personnes ». Cette aide comprend notamment des médicaments essentiels et des fournitures de chirurgie d’urgence, ainsi que des sacs mortuaires permettant le déplacement des corps et une « inhumation digne » des défunts, a ajouté l’OMS. « Il s’agit d’une catastrophe d’une ampleur épique », a déclaré le docteur Ahmed Zouiten, représentant de l’OMS en Libye, cité dans le communiqué.
Une classe politique libyenne « prédatrice »
Pour organiser les recherches, le chef de l’exécutif dans l’est de la Libye, Oussama Hamad, a affirmé qu’à partir « de samedi de nouvelles mesures seront appliquées dans la zone sinistrée » qui sera fermée, selon lui aux civils et aux services de sécurité. « Seuls les équipes de recherche libyennes et étrangères et les enquêteurs, y auront accès », a-t-il dit.
Stéphanie Williams, diplomate américaine et ex-représentante de l’ONU en Libye, a appelé à une intervention internationale urgente, préconisant la création d’un « mécanisme conjoint national/international pour superviser les fonds d’aide ». Elle a fustigé sur X (ex-Twitter) une classe politique libyenne « prédatrice » qui a tendance, selon elle, à « utiliser le prétexte de la souveraineté » pour diriger les opérations d’aide « selon ses intérêts ».